The Good : En tant qu’expert des attentes des consommateurs, des citoyens et de toutes les parties prenantes de l’entreprise (salariés, investisseurs, élus, etc…), en quoi est-il incontournable/ inéluctable aujourd’hui pour les entreprises d’engager leur transformation écologique, sociale et solidaire ?
Guillaume Petit : D’abord, parce que la sensibilité aux problématiques environnementales est en hausse constante depuis dix ans et figure aujourd’hui dans le Top 5 des sujets qui préoccupent les Français. Ensuite, parce qu’un cadre juridique nouveau, notamment avec la loi PACTE, reconsidère l’objet social de l’entreprise, y compris dans le Code civil, pour qu’elle puisse se doter d’une raison d’être, avec le concept de société à mission, et pour qu’elle favorise une meilleure représentation des salariés dans les entreprises ayant un conseil d’administration. Et enfin, pour une question d’échelle : le consommateur ne peut pas décider de la matière des packagings, du fait de passer du plastique au carton ou au bambou, de rendre recyclable un tube de dentifrice, d’arrêter de fabriquer des vestes en cuir et de passer au « cuir vegan », etc.
En revanche, les entreprises sont les actrices majeures de la transition. C’est d’elles que l’on attend des initiatives en phase avec les préoccupations écologiques ou les faits sociétaux et identitaires tels que le mouvement Black Lives Matter, l’essor de l’attitude Body Positive ou des mouvements LGBTQIA+, sans oublier les préoccupations sur la réalité de l’engagement RSE avec la parité salariale, l’inclusion, l’égalité homme – femme, les conditions de travail….
The Good : Quels sont les chiffres clés qui selon vous démontrent ces attentes ?
Guillaume Petit : Notre enquête What Worries the World le prouve, le changement climatique inquiétait 5% des Français en 2011, contre 28% en septembre 2021 ; les menaces contre l’environnement en alertaient 7% en 2011, contre 14% en septembre de cette année. Evidemment, la crise sanitaire est venue impacter la hiérarchie des préoccupations mais les phénomènes vus récemment en Europe et ailleurs ancrent l’idée que ces menaces sont de plus en plus concrètes, désastreuses, fréquentes et mondiales. De son côté, notre étude via l’Omnibus Ipsos “Facteur humain et écologie” montre que les Français pensent que le changement climatique va « plus » les impacter dans les années à venir.
Sur le plan sociétal, les entreprises se sont impliquées concrètement lorsque le gel hydroalcoolique manquait ou en proposant des blouses quand les infirmières n’avaient plus que des sacs-poubelles pour se protéger. Elles ont démontré leur utilité pour la collectivité, autrement dit leur solidarité. Logiquement, leur image a changé : en 2019, 34% des Français déclaraient avoir confiance dans les grandes entreprises, contre 53% en avril 2020, 54% en juin et 49% en avril 2021 ; il n’est pas étonnant que leur score fléchisse alors qu’elles semblent moins présentes dans le combat contre la pandémie et sont moins médiatisées. A l’inverse, la confiance dans la Présidence de la République, à 44% en 2017 décline à 36% en avril 2021 comme s’il y avait une inversion entre acteurs privés et acteurs publics, les premiers ayant des ressources matérielles et opérationnelles supérieures aux seconds. Cette inversion est une formidable opportunité pour prendre la main et accélérer les changements parce que les entreprises ont aujourd’hui les ressources et, mieux, la légitimité pour le faire.
The Good : Ipsos est partenaire de cette 1ère édition du Grand Prix de la Good Économie. Qu’est ce qui a motivé votre engagement ?
Guillaume Petit : Précisément parce que la RSE est dans l’ADN d’Ipsos, nous avons voulu être partenaire du Grand Prix de la Good Économie pour rendre manifeste notre volonté d’agir socialement : nous avons les données de nos enquêtes, et nous savons que le changement est lent et compliqué. Pour l’encourager et l’accélérer, nous montrons aux consommateurs, aux clients, aux citoyens, aux salariés, que la transition est possible, que les exemples de réussites sont nombreux, et que chacun peut être acteur, à sa mesure.