Quand la transformation digitale inspire la RSE (Youmna Ovazza – Ipsos France)

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Youmna Ovazza
Directrice Ipsos Strategy3
Ipsos en France

Dans une enquête mondiale réalisée par Ipsos pour le Jour de la Terre 2022, 70% des interviewés se déclarent préoccupés par les impacts que le changement climatique a déjà dans leur pays, 2/3 pensent que leur gouvernement doit agir pour limiter les effets du réchauffement planétaire, mais beaucoup moins se disent prêts à changer leurs propres comportements, notamment en France. C’est le fameux Say Do Gap : l’écart entre ce que les gens disent et ce qu’ils font, un écart qu’on retrouve quand il s’agit de sujets politiquement corrects, comme la lutte contre les inégalités et les discriminations.

Dans ce contexte, comment une entreprise peut-elle concrétiser ses projets en matière de RSE et de développement durable et créer les conditions pour que les consommateurs les achètent ?

Deux obstacles doivent être dépassés. Pour les entreprises : ne pas donner l’impression que leurs stratégies sont opportunistes et dictées par la conformité à des normes (objectifs de l’ONU, critères ESG, etc.) ; pour les consommateurs : ne pas les mettre en situation d’éviter une punition (malus) ou d’obtenir une récompense (bonus), ne pas les faire avancer à coup de taxes mais leur donner envie.

Autrement dit, quels sont les leviers à actionner pour se positionner comme un acteur positif avec une valeur ajoutée pour les consommateurs ?

Transposer les clefs de succès de la transformation digitale peut aider les entreprises. Il y vingt ans, les innovations de ce marché étaient en décalage avec les pratiques des consommateurs alors qu’il est devenu évident de faire des vidéos avec son smartphone, de télécharger et d’avoir accès à une quantité incroyable d’applications sur tous les types de sujets.

La première chose à en retenir est que la transformation est un sujet d’offre, pas de demande, comme toutes les inventions et créations ; la deuxième est qu’il faut les concevoir by design et pas comme une cerise sur le gâteau : l’Internet était accessible dès 1997 sur un téléphone mobile, mais son usage n’a décollé qu’avec l’iPhone, conçu « by design » pour l’utilisation d’internet. Et la troisième, il faut observer, tester et apprendre, comme Nike par exemple dont le succès des applications Nike+ (plus de 100 millions de membres en 2021) s’explique par la réceptivité des ingénieurs à l’arrivée de l’iPod et aux opportunités qu’il présentait quand ils ont vu les employés courir avec sur le campus de l’entreprise.

Les entreprises doivent donc définir leur propre vision de la RSE et de la sustainability en adressant des besoins concrets dont la combinaison rencontre différents types de valeurs et d’attentes. On le vérifie avec Back Market qui propose des appareils électroniques de marque reconditionnés et recyclés et se positionne simultanément sur les territoires de l’économie (dépenser moins) et de l’écologie (optimiser la gestion des ressources), et rencontre une tendance sociale (consommer moins, mieux, autrement) sans imposer quoi que ce soit aux consommateurs, avec un écosystème de revendeurs certifiés sur ces nouvelles pratiques qui vont eux-mêmes faire bénéficier de leur savoir-faire d’autres sociétés.

Les stratégies RSE sont d’autant mieux reçues que l’interne et les partenaires sont impliqués par la co-construction, révèlent de nouvelles opportunités, et portent activement un parti-pris de transformation profonde : c’est à leur engagement que le consommateur reconnaît la sincérité de l’entreprise et que sa dimension citoyenne peut se réveiller, celle-ci n’étant pas incompatible avec un bénéfice personnel réel.